L'indépendance, oui, mais à quel prix ?
Me voici "indépendante". Cela implique que, les 75 premières années de ma vie, j'étais dépendante. Je décide que la question mérite réflexion. C'est tout de même ahurissant d'avoir été dans cet état, un peu comme un état second, sans m'en rendre compte. Mais à qui, à quoi étais-je soumise ? Je croyais avoir fait tout ce que la société présageait de moi : étudier, obéir, travailler, payer des impôts, même fantaisistes eux aussi (une telle imagination, ça frise le grand art), payer des lois sociales. Qu'est-ce qui a changé dans ma vie ? J'écris. SI on écrit, c'est d'abord pour soi, mais aussi et surtout pour être lu. C'est tout moi, j'y vais, la fleur au fusil. Mais c'est ici que les soucis commencent : l'aspirant écrivain est rapidement confronté à des problèmes légaux et financiers, les seconds étant des dommages collatéraux des premiers.
Un collègue plus averti que moi m'a expliqué que, si un écrivain auto-édité veut vendre ses livres, il faut qu'il s'inscrive à la TVA, faute de quoi, il ne peut facturer. FRAUDE, s'inscrit en lettres de sang dans la partie de mon cerveau où se niche la conscience morale. J'ai donc suivi ce judicieux conseil et me suis présentée à un guichet d'entreprise, après avoir vérifié que ce service était gratuit. Oui, même à 75 ans, on y croit encore, alors qu'on n'arrête pas de vous répéter que la gratuité, ça n'existe pas. Résultat de ce cadeau maléfique : la journée d'inscription : 279 € pour la TVA, somme rapidement suivie des lois sociales 142 € par trimestre. Pourquoi des lois sociales alors que je suis retraitée et que j'ai cotisé toute ma vie ? Cette quote-part, va-t-elle m'apporter un appoint de pension, un pécule de vacances, aurai-je un remboursement complémentaire pour couvrir les médicaments, les frais médicaux ? Bref, le jackpot ? Que nenni !
Tout ça pour aboutir à un régime de franchise de TVA, puisque les revenus de mon activité littéraire seront nettement inférieurs à mes dépenses. Roupie de sansonnet !
De fil en aiguille, je m'interroge tout de même. J'ai beau avoir une foi de charbonnier en nos structures et nos systèmes, mais à mon corps défendant, je m'insurge ! On demande aux citoyens d'oser entreprendre, mais pourquoi le chemin est-il semé d'autant d'embûches ? En outre, la création artistique ne devrait-elle pas être considérée comme un bien immatériel, donc non soumise à TVA ?
À bientôt, lecteur. Prochain article : mon logo.
Anne Amram
Comments